J'ai presque six ans...
Cette année, la fin des vacances d’été ne me réjouit pas… J’entre à la grande école ! Ma sœur m’a prévenue… On ne peut pas parler, il faut écouter et travailler… Madame Joséphine est très sévère…
Pour la circonstance, maman nous a cousu un magnifique petit tablier bleu ciel parsemé de petites fleurs blanches et rouges… Le cordonnier du village a fabriqué pour moi, un petit cartable en cuir brun foncé… La cloche sonne… Les plus grandes accourent devant l’entrée pour faire le rang… (Toutes les filles de six à quatorze ans sont dans la même classe). Nous, les petites « nouvelles » jetons un coup d’œil d’envie à notre ancienne classe et Mademoiselle Gisèle nous fait un petit signe de la main… Le cœur un peu serré, je m’installe à la place qui m’est désignée… « Debout mademoiselle ! Vous saurez qu’ici, on s’assied quand je l’autorise ! » Il faut d’abord réciter la prière (l’acte de contrition… que je ne connais pas…) puis écouter les consignes. Faire silence, répondre uniquement si Madame nous le demande et lever son doigt si on a une question à poser… Les livres distribués, j’ai hâte de lire (j’avais appris avec maman) et calculer avec de vraies additions… au lieu de cela, il faut compter des poussins, des lapins… et inscrire le chiffre adéquat… En trois minutes c’est fait… J’explique tout bas à ma voisine qui n’y arrive pas…
Mon nom est inscrit au tableau… ça veut dire, une mauvaise note… j’ai pourtant l’impression d’être si sage… ça veut surtout dire que je n’aurai pas cinquante sur cinquante (comme c’est l’habitude pour mon frère et ma sœur…) à mon premier bulletin hebdomadaire… (Il y avait cinq branches : religion, devoirs, leçons, assiduité (j’ai compris plus tard que ça voulait dire travail en classe) et discipline (ça, j’ai tout de suite deviné que c’était le bavardage…)
En rentrant à la maison pour le repas de midi, j’ai éclaté en sanglots et ai supplié maman de ne pas m’obliger à retourner dans cette école ! Pour me consoler, elle m’a offert une petite boite ronde en plastique beige pour mettre les déchets des crayons taillés… je ne l’ai pas gardée une heure ! Je voulais la montrer à ma voisine de banc… « Donnez-moi ça tout de suite ! Vous allez être distraite avec cette boite ! » Et vlan ! Une deuxième mauvaise note inscrite au tableau… (Sur la semaine, il y en a eu cinq… Je suis rentrée le samedi avec un très mauvais bulletin : 47,5 sur 50 !) J’ai beaucoup pleuré dans les bras de maman… (Elle m’a avoué bien plus tard, que ses larmes se mélangeaient aux miennes, mais je ne le voyais pas…)
Le lundi matin, la fameuse petite boite était revenue sur mon banc…
La suite au prochain billet.
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