C'est la kermesse
Les carrousel, tir et autres attractions foraines sont installés tout près de chez moi… Les forains sont arrivés mardi et depuis, en sortant de l’école, les enfants regardent avec envie le montage du manège… Tchoupinette voulait déjà y aller mercredi !!
Ce soir, pour permettre à leurs parents de faire la fête, mes six petits amours dorment à la maison.
Demain, tous les villageois sont invités à l’apéritif… un accordéoniste agrémentera ce moment de retrouvailles… Un accordéoniste !! Comme au temps de mon enfance !
Maman m’a raconté… Quand elle était enfant, il y avait seulement une marchande de bonbons en sucre, vendus pour quelques sous…
En septembre 1938, elle a seize ans… et ma grand-mère lui a enfin donné l’autorisation d’aller au bal. Il fait bon. Les gens dansent dehors. Des bancs sont installés pour les mamans chaperons qui accompagnent leurs filles. Des lampions suspendus entre les arbres éclairent la piste… Les jeunes hommes – debout, rassemblés d’un autre côté - achètent des tickets pour payer les danses. (Ces tickets sont ramassés pendant une pause au milieu de la danse). Dès dix-huit heures, la soirée commence. Elle se termine au plus tard à minuit.
Un tout jeune homme (Albert – dix-neuf ans) invite maman à danser… Après un moment, ils décident d’aller boire un verre dans le café juste à côté. Ma grand-mère l’aperçoit, elle est fâchée et ordonne à maman de sortir tout de suite… Elle a la permission de danser, mais pas de boire (n’importe qui pourrait lui verser une drogue dans son verre !!!)
Vers vingt heures, le garde-champêtre arrive et fait cesser la musique… La fête est finie, c’est la mobilisation générale. Tous les jeunes gens doivent rejoindre l’armée. (Papa fait partie du groupe… Il a vingt-et-un ans)
Chacun rentre chez soi. Mes grands-parents allument la TSF et maman entend Hitler qui crie très fort et aussi le bruit des bottes de l’armée allemande…
Heureusement, tout s’est arrangé et le dimanche suivant, la fête recommence et maman retrouve « son » Albert.
La semaine après, il lui a envoyé une carte, mais, sur ordre de ma grand-mère, à contre cœur, elle lui a répondu de ne plus écrire parce qu’elle était trop jeune…
Ici, c’est vraiment la fête ! Les enfants dorment et j’entends la musique de la soirée dansante…