Un sapin naturel
J’ai toujours aimé l’odeur des sapins…
Papa était brigadier forestier… Tous les jours, vêtu de son uniforme vert, il arpentait à pied, des hectares de forêts… La faune et la flore de « ses » bois n’avaient aucun secret pour lui…
A la sortie de l’hiver, il ramenait pour maman, le premier bouquet de jonquilles qu’il avait cueilli dans un endroit bien exposé que lui seul connaissait… En mai, c’était le muguet… En été, une boite de myrtilles, en automne, quelques branches au feuillage multicolore… Parfois encore, un beau petit caillou qu’il m’offrait, un morceau de souche à la forme particulière ou une petite plume bleue de geai… Son sac renfermait toujours l’un ou l’autre trésor pour la petite fille que j’étais…
Certains jours, il rapportait « la tartine du lièvre »… (le surplus de son casse-croute)… on partageait ce délice aux senteurs de résine, avec mon frère et ma sœur en veillant à faire des parts égales…
Le soir, quand je savais qu’il allait rentrer, je courais l’attendre à la sortie du village… En me voyant, il s’arrêtait et m’aidait à grimper sur le porte-paquets de son vélomoteur… Pour ne pas tomber, je l’entourais de mes bras et le serrais très fort… J’étais plus fière qu’une reine…
Il connaissait les endroits de passage du gibier et leurs habitudes…
De rares fois, il m’a permis de l’accompagner… Nous nous levions avant le soleil et munis d’une paire de jumelles, nous marchions en silence… (interdit de tousser ou d’éternuer, veiller à ne pas poser le pied sur une branche qui craque…) il fallait parfois faire un grand détour pour avancer face au vent… Tout à coup, papa s’arrêtait et me montrait un chevreuil ou une biche qui mangeait dans une clairière… La nature qui s'éveille... quel merveilleux spectacle!
A l’approche de Noël, avec mon frère, ils allaient choisir et couper un bel épicéa…
La bonne odeur de sapin entrait dans la maison…
Voilà pourquoi, chaque année, j’achète un sapin naturel. Il embaume la maison… Alors, je me souviens…